Barbelés_LesIrrésistibles

Le lecteur est triste quand il tourne la dernière page de Barbelés, de Pierre Ouellet, publié aux Éditions Sémaphore dans la toute nouvelle collection « Libre à Vous ». Il est triste et enchanté. Il vient de lire le beau récit d’un mauvais garçon qui a connu les maisons de correction à partir de l’âge de treize ans, ensuite les différentes prisons du Québec. Premier vol armé en 1972, à vingt-trois ans, condamnation à vie en 1986 pour tentative de meurtre sur un policier. Voilà donc le mauvais garçon enfermé pour longtemps. Il lit – il a toujours lu, nous apprend-il, de la poésie, de la fiction, de la philosophie. Quand il commence à écrire, c’est «par besoin de comprendre mes crimes… et pour simplement passer le temps, ne rechercher que l’agencement des mots pour me distraire du mécanisme chronologique que me slow motion mes journées.»
Difficile de comprendre les mauvais garçons. Ils ont beau nous expliquer ce qui se passait en eux, ce qui les entraînait dans la violence, cette violence ne se comprend pas et c’est quand l’auteur nous le dit que nous nous sentons proche de lui, semblable.
«Quand j’avais la mine à terre, dans mon adolescence ou dans ma vie adulte, je finissais toujours par concevoir un projet d’évasion.»
Il y a du Hubert Aquin, du Réjean Ducharme dans cette donne : s’évader, s’évader tout le temps. Seule issue : lire, écrire, peindre aussi.
Le livre de Pierre Ouellet se clôt à quelques mois de sa libération conditionnelle. Plus jamais la violence, jamais, nous a-t-il répété maintes fois. Le prière d’insérer nous indique que dix mois plus tard, il récidive, deux fois plutôt qu’une. Le lecteur est triste. En même temps, il se dit : Ouellet, tu nous dois maintenant un autre livre, pour nous expliquer, encore nous expliquer, parce que nous aussi le besoin d’évasion nous démange. Les irrésistibles

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